jeudi 20 juin 2013

Une nouvelle vie dans ma vie

     
     Presqu'un an s'est écoulé. Ce fut l'année la plus riche, la plus dense, et une des plus intenses émotionnellement, de toute ma vie. Il y a presque un an, je mettais au monde mon enfant. 
Les premiers mois, le temps a pris de l'épaisseur, s'est étiré comme un accordéon, transformant les secondes en minutes, les minutes en heures et les heures en jours tant chaque instant passé était nouveau, prenant, déroutant. La routine n'existait pas encore dans cette nouvelle vie qui s'inventait à chaque seconde. Puis peu à peu, de nouvelles habitudes, nées sur le tard, se sont créées ; des dizaines de biberons donnés avec toujours autant de plaisir, autant de couches changées inlassablement, avec le même enthousiasme pour ce moment de complicité entre bébé allongé et moi, penchée. 
Il a fallu apprivoiser la fatigue, la plus grande fatigue de ma vie, les premières semaines, lorsqu'il fallait se lever plusieurs fois et donner à manger dans les profondeurs de la nuit, où le seul bruit qui comptait, que j'entendais, était celui de l'enfant qui tète. Ce sommeil qui n'est définitivement plus le même. 
Et puis, les découvertes, les premières fois, les progrès, petit à petit, par sursaut, par à-coup, qui à eux seuls suffisent à faire oublier ce sommeil qui manque, ce temps à soi dont on ne savait quoi faire auparavant (c'est vrai, que faisais-je de tout ce temps que je n'ai plus ?...) et qui nous manque aujourd'hui, au profit d'un bonheur dont on ne soupçonnait pas la possibilité, un bonheur sans mesure, sans début ni fin ni limite, le bonheur de voir son enfant grandir sous ses yeux.
Depuis quelques jours, C. se met debout tout seul...oui, tout seul ! Cette faculté nouvelle me réjouit autant qu'elle m'accable : mon bébé devient un petit garçon, l'accordéon du temps vient de se rétracter d'un seul coup parce qu'avec le recul, le temps passe très vite...
Il a fallu se réinventer un vie à deux, une vie sociale ; il y avait les soirées hier, il y a les goûters aujourd'hui. Des amis perdus, de nouveaux amis. Des dîners improvisés ont remplacé de longs marathons culinaires : j'étais capable de passer trois jours à cuisiner pour quelques amis qui venaient dîner le samedi soir. Ces derniers mois donc, il y a eu un fameux curry thaï refait une petite dizaine de fois, parce qu'il suffisait d'un peu de pâte de curry jaune achetée à la Grande Epicerie diluée dans du lait de coco et quelques feuilles de citronnier pour parfumer de simples lamelles de poulet, une salade italienne faite de légumes marinés (artichauts, poivrons grillés, aubergines, tomates semi-séchées), d'une boule de mozzarella di bufala à la fleur de sel, de quelques tranches de bresaola un peu froissées, d'olives aux amandes parce que ce sont celles que je préfère, et d'un lit de roquette, ou une panna cotta que je servais avec une confiture de Christine Ferber (mangue ou ananas-vanille).
Et puis, maintenant que cette nouvelle vie dans ma vie s'est construite, structurée, il y a cette envie de refaire des choses pour soi, pour rien. Des romans et des essais à lire, des textes à écrire, des films à voir, des saveurs à goûter. Pour rien, pour soi, pour partager aussi. Voilà pourquoi j'écrirai ici, comme je l'avais déjà fait, ailleurs, dans une autre vie...

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